Millefeuilles

Biographie d'un auteur imaginaire : Christian Jambière

Christian Jambière est né en 1953 dans un petit village de Lorraine au nom difficilement prononçable : Aspelchist. Cette ignominie langagière fut la première pierre qui l’amena, vingt ans plus tard, à embrasser la carrière d’écrivain. En effet, comme Christian Jambière se plaisait lui-même à le dire lors de la parution de son best-seller Vivre dans l’oubli du langage, « Mes jeunes années à Aspelchist m’ont au moins appris une chose : lorsque les gens deviennent incapable de se rappeler correctement le nom de leur village, c’est que quelque chose de fort c’est perdu : la transmission d’une histoire locale. C’est ce que j’ai voulu restaurer en devenant écrivain».

 

Christian Jambière a longtemps parcouru les ouvrages de Lacan, faisant du langage son fer de lance, sa marque de fabrique éditoriale. Après le vif et nerveux Vivre dans l’oubli du langage, il signe avec L’inconscient, ce mot qui s’efface au moi un ouvrage mature et déstabilisant, miroir de la psyché torturée de son personnage central, Théodore. « Théodore ne ressemble à personne, puisqu’il n’est à la fois personne et quelqu’un d’autre. Son moi est inexistant, car le langage lui échappe ».

 

A cinquante quatre ans il va s’intéresser au sujet des enfants sauvages, en particulier au très connu Victor de l’Aveyron, figure éponyme ayant connu une adaptation cinématographique éblouissante par Truffaut. « Lorsque j’ai vu ce film, j’ai été fasciné par cette absence de dialogue entre l’homme civilisé et l’homme sauvage. Le premier était bloqué dans son univers de lettres et de mots tandis que le second vivait dans un monde qui ne signifiait rien à ses yeux ». C’est de cette réflexion que naitra Les choses en 2007 suivit de Les ténèbres sans noms  en 2009. Dans ce second livre, il dépeint la vie d’une jeune fille, Hélène, aveugle et sourde de naissance, qui se débat dans un monde agressif qu’elle ne peut comprendre car inaccessible à sa pensée. « Hélène s’inspire d’une véritable histoire. J’ai voulu, avec « les ténèbres sans noms » investiguer la brutalité d’un univers déconstruit, démantelé. En y réfléchissant bien, Hélène vit dans le chaos ».

 

On décrit souvent Christian Jambière comme un fou littéraire, préférant à la romance la minutie de la psychanalyse. Ses détracteurs disent de lui qu’il ne sait pas écrire, mais qu’il ne sait que décrire froidement une succession de faits. Son caractère bien trempé a souvent fait l’objet des railleries de ses contemporains. Robert Tufou, à son sujet, s’emporta vivement lors du fameux colloque de 2002 et hurla à l’assemblée présente, suite à un vif débat entre les deux auteurs sur le thème de l’imaginaire littéraire : « M. Jambière parle comme il écrit, comme un idiot qui se croit intelligent. Mais j’apprendrais à M. Jambière qu’être snob n’a encore jamais fait de quelqu’un un bon écrivain ». Rappelons que Robert Tufou se fait le partisan acharné du « Baroque New Age », mouvement radicalement opposé à celui de Christian Jambière.

 

Justement, Christian Jambière, longtemps ignoré, a su néanmoins s’imposer en adhérant au cercle des « Naturalistes New Age », mouvement controversé se réclamant « proche de la vérité des choses ».

 

Christian Jambière travaille actuellement sur un nouveau roman, qui, cette fois, sortira de ses sentiers habituels : « j’avais envie depuis bien longtemps de me lancer dans la science-fiction. Et quoi de plus intéressant que d’imaginer, dans notre futur, l’influence des technologies sur les problématiques du « parle-être ». » Suite à cette déclaration, Robert Tufou ne se priva pas de le critiquer dans une interview accordée à Télérama : « Après son charlatanisme psychanalytique, M. Jambière se lancer dans l’escroquerie futuriste ».

 

Christian Jambière a dédié sa vie à l’écriture et à l’investigation du rapport entre l’homme et son langage. Il en a sacrifié jusqu’à sa vie personnelle, vivant de manière quasi-monastique, à l’écart du monde dans sa maison alsacienne. Il n’y sort guère qu’à l’occasion de colloques, conférences et expérimentations diverses. Pour un homme autant fasciné par la parole, on peut trouver curieux son admiration du silence. Il répondit aux journalistes qui lui posèrent la question : « J’aime le silence, c’est vrai. C’est grâce à lui qu’on comprend que l’on existe en tant qu’être indépendant, réfléchi. Je ne vais pas vous refaire Descartes, mais vous comprenez ce que je veux dire ». Ce à quoi Robert Tufou répondit « M. Jambière aime à citer Descartes, je citerais pour ma part mon voisin de pallier : à parler comme un livre, on n’est pas prêt de serrer les gonzesses ». 



15/03/2013
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